Les grandes figures de l'athlétisme québécois (6/8)
15 novembre, 2020
Lucette Moreau, Lemlem Ogbasilassie, Sonia Paquette, Nicolas Macrozonaris, Alexandre Marchand et Alain Métellus
Par Denis Poulet, Responsable du comité des records, FQA
Lucette Moreau
Au cours de sa carrière d'une douzaine d'années du début des années 1970 jusqu'au début des années 1980, Lucette Moreau a inscrit pas moins de 24 records du Québec au disque et au poids dans tous les groupes d'âge. Ce qui est remarquable, c'est qu'elle détient encore aujourd'hui (2020) deux records canadiens et cinq records québécois.
Elle aurait été la lanceuse numéro un au Québec et même au Canada dans les années 1970, n'eût été l'arrivée au Québec en 1973 de la Roumaine Carmen Ionesco, 7e au disque aux Jeux olympiques de Munich en 1972 et de cinq ans plus âgée que Lucette. Carmen et Lucette ont souvent concouru ensemble et se sont échangé des places sur le podium des Championnats canadiens à plusieurs reprises.
En 1975, aux Jeux panaméricains de Mexico, Lucette, qui n'avait que 19 ans, remportait une surprenante médaille de bronze au lancer du poids. Sa performance de 16,96 m est toujours le record canadien et québécois junior du poids.
Lucette a fait très bonne figure aux Jeux olympiques de Montréal, obtenant la 11e place dans les deux concours. Signalons par ailleurs sa médaille de bronze au disque aux Jeux du Commonwealth de 1978 à Edmonton et sa 5e place, également au disque, aux Jeux panaméricains de 1979 à Porto Rico. Lucette fut championne nationale du poids en 1976 et du disque en 1976 et 1980.
Lemlem Ogbasilassie
Lemlem Bereket Ogbasilassie est devenue une athlète d'élite québécoise dans des circonstances vraiment hors du commun. En juillet 2003, elle représentait l'Érythrée, son pays d'origine, aux 3e Championnats du monde jeunesse qui avaient lieu à Sherbrooke. Elle se classa 4e du 1500 m en 4:19,09 min à l'âge de 15 ans. C'est alors qu'elle décida de faire défection, demandant l'asile politique au Canada. Elle ne connaissait personne au Québec, mais le milieu de l'athlétisme québécois l'accueillit, la soutint et lui donna la possibilité de développer son talent.
Lemlem brilla aussitôt, tant sur route que sur piste. Au point que, en 2006, elle fut choisie athlète junior par excellence de l'année au Québec. L'année précédente, elle avait remporté la médaille d'argent du 1500 m aux Jeux du Canada. Elle se spécialisera ensuite dans le 800 m où, à compter de 2008, elle put représenter le Canada, ayant acquis la nationalité canadienne. Elle fut ainsi de la délégation nationale aux Mondiaux de 2011, où elle boucla les deux tours de piste en 2:03,62 min en qualification, temps malheureusement insuffisant pour aller plus loin.
Le 10 juin 2012, à Vancouver, elle réalisa un temps de 2:01,23 min au 800 m, effaçant le record québécois de Renée Bélanger qui remontait à 1985. Elle porta ce record à 2:00,85 min le 7 août suivant à Ninove, en Belgique, puis atteignit son sommet de 2:00,82 min le 10 juin 2012 à Burnaby, en Colombie-Britannique. Cette année-là, elle remporta le titre national, après avoir gagné la médaille d'argent en 2010 et 2011. Sa carrière se poursuivra jusqu'en 2015, marquée d'un record personnel de 35:10 min au 10 km sur route, à Victoria.
Sonia Paquette
Sonia Paquette s'est particulièrement distinguée au 100 m haies au cours d'une carrière qui s'est échelonnée sur une quinzaine d'années. Elle a remporté sept médailles aux Championnats canadiens dans cette épreuve, dont deux titres (1992, 1996).
En 1992, Sonia a brillé dès sa première grande compétition internationale, se classant 4e du 100 m haies des Championnats du monde juniors à Séoul, en Corée. L'année suivante, aux Jeux mondiaux universitaires, à Buffalo, elle décrochait une 5e place. Aux Jeux olympiques d'Atlanta en 1996, elle n'a pas dépassé le 1er tour, mais elle s'est reprise en 1997, aux Jeux mondiaux universitaires à Catane, en Italie, en atteignant la finale (8e). En 2001, à Ottawa, elle se classa 6e en finale des Jeux de la Francophonie.
Sonia détient toujours le record du Québec junior du 100 m haies (13,63 s en 1992). Elle a franchi le cap des 13 secondes en 2000 (12,96 s), mais le vent était légèrement supérieur à la limite (+2,1). Sa meilleure performance officielle (13,11 s en 1996) la place au 3e rang des meilleures Québécoises de tous les temps, après Julie Rocheleau et Jessica Zelinka. Sonia a reçu six trophées Athlétas entre 1993 et 2001, dont quatre à titre d'athlète sénior de l'année au Québec.
Nicolas Macrozonaris
Au début des années 2000, certains voyaient Nicolas Macrozonaris comme le successeur de Bruny Surin. Le sprinter lavallois n'est pas allé aussi loin, mais il est le sixième performer canadien de tous le temps sur 100 m (10,03), il a remporté quatre fois le titre national du 100 m et une fois celui du 200 m, il est le seul Québécois à avoir réussi le doublé 100-200 aux Championnats canadiens (en 2003), il a couru trois fois le 60 m en salle en moins de 6,60 s, et il a participé à deux Jeux olympiques et à six Championnats du monde (en salle et en plein air).
La moyenne de ses 10 meilleures performances au 100 m est remarquable : 10,169 s. Elle comprend le fameux 10,03 de Nicolas à Mexico le 3 mai 2003 quand, à la surprise générale, il a battu les Américains Tim Montgomery, alors détenteur du record du monde, Jon Drummond et Coby Miller. Il a atteint les demi-finales des Jeux du Commonwealth de 2002 et celles des Mondiaux de 2003, ainsi que la finale des Jeux de la Francophonie à deux reprises (4e en 2001, 5e en 2009). Il excellait en salle, au 50 m et au 60 m, épreuves où il détient d'ailleurs les records du Québec U23 (5,69 s et 6,60 s respectivement).
Un an après ses débuts, en 1999, il égalait le record canadien junior du 50 m en salle (5,83 s), puis l'année suivante, aux Championnats canadiens à Victoria, il épatait avec un retentissant 10,19 s en qualification du 100 m, suivi d'une 4e place en finale (10,25 s), ce qui lui valait sa sélection olympique pour les Jeux olympiques de Sydney. En 2001, il remporta l'argent aux Championnats canadiens, puis, l'année suivante, son premier titre national. Nicolas fut nommé athlète espoir de l'année au Québec en 2000, 2002 et 2003.
Alexandre Marchand
Alexandre Marchand est le seul athlète québécois avec Rova Rabemananjara à avoir couru sous les 50 secondes au 400 m haies. Et il l'a fait plus d'une fois, la moyenne de ses dix meilleures performances dans cette épreuve étant de 49,931 s; de fait, il compte sept chronos à moins de 50 secondes. Faut-il ajouter qu'Alexandre était aussi très rapide au 400 m plat? Il est l'auteur de la 2e performance québécoise de l'histoire à 46,12 s.
Alexandre a été champion canadien du 400 m haies à deux reprises (1998, 1999) et du 400 m une fois (1997). Il a aussi gagné la médaille d'or des deux épreuves aux Jeux du Canada de 1997, à Brandon, au Manitoba. Il s'est par ailleurs fortement distingué sur la scène universitaire nationale en réussissant trois fois de suite (1998, 1999, 2000) le doublé 300-600 m aux Championnats de Sport interuniversitaire Canada (SIC).
À 19 ans, il participait aux Mondiaux juniors, en Australie, où il se classa 6e du 400 m haies en 51,29 s. En 1998, il se retrouvait aux Jeux du Commonwealth, en Malaisie : éliminé en qualification du 400 m haies, il contribua à la 8e place du Canada au relais 4 x 400 m (3:04,84 min). L'année suivante, il fut de l'équipe canadienne aux Mondiaux, mais ne put franchir le 1er tour ni au 400 m haies ni au relais 4 x 400 m. C'est aux Jeux mondiaux universitaires de cette année-là, disputés à Palma de Majorque, en Espagne, qu'il connut son meilleur résultat international, une 7e place au 400 m haies (49,72 s); en demi-finale, il avait atteint un sommet personnel de 49,51 s, chrono qui le situe au 3e rang canadien de tous les temps.
Alexandre détient sept records du Québec, incluant celui du 300 m en salle (33,40 s en 1999, alors record canadien) et celui du 600 m en salle (1:17,26 min en 2000); ces deux performances le classaient 2e dans le monde. Il a reçu cinq trophées Athlétas entre 1994 et 1999, choisi notamment athlète espoir de l'année trois années de suite.
Alain Métellus
Alain Métellus a brillamment pris la relève de Claude Ferragne comme tête d'affiche du saut en hauteur québécois, effectuant une magnifique progression au cours des années 1980. À 15 ans, Alain volait déjà au-dessus des 2 mètres (2,01 m, puis 2,05 m, record du Québec cadet). L'année suivante, en 1981, il monte à 2,10 m, puis à 2,13 m, record du Québec juvénile et junior. En 1982, il n'a encore que 16 ans, mais gagne le championnat canadien en salle à Saskatoon en s'élevant à 2,18 m, puis ajoute 2 cm à cette marque au championnat provincial; ce 2,20 m est toujours le record canadien juvénile en salle. L'été suivant – il vient d'avoir 17 ans –, il franchit 2,21 m aux Championnats canadiens juniors à Winnipeg, c'est un record national junior.
Toujours en 1982, Alain participe aux Championnats panaméricains juniors au Venezuela, où il remporte la médaille d'or à 2,20 m. Quelques semaines plus tard, il est aux Jeux du Commonwealth, en Australie, où il se classe 6e (2,14 m).
En 1983, notre jeune prodige poursuit son ascension. À 18 ans, il est sélectionné pour les Jeux universitaires mondiaux (5e à 2,26 m), les Jeux panaméricains (5e à 2,21 m) et les premiers Championnats du monde (éliminé en qualification, à 2,10 m). En 1984, il atteint d'abord 2,28 m en salle (le 26 février à Toronto), puis se retrouve aux Jeux olympiques de Los Angeles, où il n'arrive pas à se qualifier pour la finale (2,18 m). L'année suivante, Alain obtient son premier titre national en plein air en égalant son record en salle (2,28 m). En 1986, il est médaillé de bronze des Jeux du Commonwealth (2,14 m) et sera de nouveau présent à ces Jeux en 1990, où cette fois il se classera 5e (2,23 m).
Aux Championnats canadiens en plein air, Alain a remporté un total de sept médailles (2-4-1). Il détient toujours deux records canadiens en salle et sept records du Québec, en salle et en plein air.
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