Les plus vieux records du québec
6 janvier, 2020
Par Denis Poulet, responsable du Comité des records
Les records sont faits pour être battus, dit-on. Mais certains records ont la vie plus dure que d'autres. La base de données des records permet désormais d'en tirer plusieurs statistiques intéressantes. Voici une liste des 25 plus vieux records du Québec.
Liste des 25 plus vieux records du Québec
Le plus ancien? Celui de Lucette Moreau au disque chez les cadettes, 44,80 m réalisé le 18 juillet 1971 à Narbonne, en France. Ce record a eu 48 ans en 2019, résistera-t-il encore deux ans pour atteindre la cinquantaine? La meilleure cadette l'été dernier, Camille Desjardins (CASI), n'a atteint que 36,68 m. En 2017, Vanessa Ayers (VAIL), avait fait un peu mieux, 37,03 m. Elles étaient loin du compte
Lucette Moreau est un phénomène dans l'histoire de notre athlétisme. Quatre autres des 10 plus vieux records lui appartiennent : 49,88 m au disque U18 en 1973 (46 ans), 54,12 m au disque U20 en 1975 (44 ans), 16,96 m au poids U20 en 1975 (44 ans) et 58,58 m au disque U23 en 1976 (43 ans). Son record au poids, réalisé aux Jeux panaméricains de 1975 à Mexico (et bon pour la médaille de bronze), est aussi le record canadien U20 toujours en vigueur. Sur la photo en tête de l'article, vous pouvez voir Lucette Moreau participant au lancer du disque aux Jeux olympiques de Montréal de 1976. (Photo PC/AOC)
Robert Vinette, qui a aujourd'hui 67 ans, détient un record presque aussi vieux que celui de Lucette, là encore au disque. Son jet de 53,42 m le 25 juillet 1972 à Montréal, il y a donc plus de 47 ans, n'a jamais été surpassé en catégorie U23. C'est aussi la 3e performance québécoise de tous les temps.
Le plus vieux record sur piste appartient au Montréalais Rick Janes qui, à 16 ans, a couru un 3000 m en 8:27,2 lors des 2e Jeux du Canada, à Burnaby (CB), en juillet 1973. C'est toujours le record du Québec U18, 46 ans plus tard.
En salle, le plus vieux record est l'uvre de Richard Lacombe, 14,95 m au triple saut U18 en 1974 à Edmundston (NB), aux Championnats de l'Est du Canada. C'était un exploit phénoménal, car ce record était aussi un record canadien U18 qui a subsisté jusqu'à nos jours. Richard était d'ailleurs un athlète exceptionnel qui, trois ans après ce record, deviendra l'un des meilleurs décathloniens canadiens, obtenant 7374 points (équivalent de 7288 points selon la table actuelle) dans un décathlon aux États-Unis.
D'autres vieux records sont impressionnants : 64,68 m au disque sénior par Carmen Ionesco en 1976 (9e de la liste), 13,89 au 110 m haies espoir par Patrick Fogarty en 1977 (11e), 47,79 au 400 m en salle sénior par Bruce Roberts en 1978 (15e) et 2:36,9 au 1000 m sénior par Francine Gendron en 1978 (17e).
La liste comprend trois records de vétérans. À l'âge de 46 ans, Ed Whitlock a couru un 1500 m en 4:12,08 le 8 juillet 1977 à Montréal. Et dans la même compétition, mais le lendemain, Evelyne Saull a réussi un saut en longueur de 4,96 m, elle aussi chez les 45-49 ans. Il faut également citer, au 25e rang, le record de Ian Hume à la longueur chez les 65-69 ans, soit 5,00 m le 4 juillet 1980 à Philadelphie. Ian Hume (1914-2006) fut un grand bâtisseur de l'athlétisme québécois : à titre d'entraîneur, d'officiel et d'organisateur de compétitions, surtout dans les années 1960, mais aussi d'athlète vétéran. Il détient encore une douzaine de records canadiens, qui sont autant de records québécois, chez les 65 ans et plus.
Le record de Ian Hume de 1980 est le seul avec celui de Bruno Pauletto au poids en salle à être postérieur aux années 1970. Vingt-trois des 25 records de la liste ont en effet été réalisés entre 1971 et 1979. Mais parlons-en du record de Pauletto. C'est le record sénior, à 20,02 m, réalisé le 29 février 1980 à New York, aux Championnats des États-Unis; Bruno s'était alors classé 5e de cette prestigieuse compétition.
Or, cette performance fut quasiment ignorée au Québec. C'est que le record appartenait à Bishop Dolegiewicz depuis 1976, soit 20,03 m. Ce Québécois d'adoption, d'origine ontarienne, avouera cependant en 1990, devant la Commission Dubin qui enquêtait sur le dopage dans l'athlétisme canadien à la suite de l'affaire Ben Johnson, qu'il avait fait usage de produits dopants durant la majeure partie de sa carrière. Athlétisme Canada supprima alors tous ses records. La Fédération québécoise fit de même des années plus tard, mais remplaça son record en salle par une marque beaucoup plus faible (16,35 m par Apostolos Drogaris en 1999). Ce n'est qu'en 2014 que le Comité des records de la Fédération tira des oubliettes la performance de Bruno à New York.
Regardez bien les 25 records de la liste. Ce sont des performances brillantes, dans certains cas quasiment inatteignables. Mais d'autres fameux records de ces années-là ont fini par être battus, parfois des décennies plus tard. Bon an, mal an, il se bat chaque année autour d'une quarantaine de records dans les catégories U14 à séniors et plus d'une centaine chez les vétérans. C'est un signe indéniable de progression. Mais indubitablement, il y a des héros du passé qui s'accrochent